Winter's Bal

Edward le regarda en le sentant soudainement douter. Douter de lui. Couter d'elle. Il pinça les lèvres et se tournant vers lui, posant une main sur son épaule, avec douceur et fermeté, plongeant son regard dans le sien de force :

- Théodore. Nous partirons dans trois jours. Trois jours. Alors tu peux rester sur ce balcon et la regarder t'échapper parce que je ne donne pas longtemps avant que quelqu'un ne remarque la ressemblance avec Henriette d'Angleterre, elle a tout d'une Stuart... Sauf peut-être les yeux. Ou alors tu peux prendre ton courage à deux mains et lui faire ta demande...

Il soupira en ajoutant, d'une voix plus douce :

- Elle t'aime, cela ne fait aucun doute... Elle n'a plus aucune raison de refuser. Parce que je crois que c'est ce qu'elle aurait fait... Pour toi. Mais aujourd'hui, elle n'est plus la petite baronne de l'autre jour qui cachait ses larmes alors que tu quittais les appartements du Duc de Norfolk. Elle est princesse d'Angleterre. Ton égal. Alors, ne doute surtout pas d'elle.

Alors que Théodore doutait plus que jamais, Edward fut heureusement présent pour lui remettre les idées en place, le secouant en lui rappelant ce que son hésitation pouvait lui faire perdre. Il se mordit donc la langue avant d’opiner, adoptant cette résolution.

« Je… Oui, tu as raison. J’y vais. Maintenant. Avant que toute once de courage ou de bon sens ne m’abandonne. »

Il frappa amicalement l’épaule d’Edward pour toute forme de remerciement avant de quitter le balcon, se dirigeant calmement vers la salle. Lisabelle lui tournait alors le dos, et c’est Elsa qui le vit la première. Elle esquissa un sourire entendu, avant de s’éclipser avec un clin d’oeil pour la princesse, disparaissant bientôt dans la foule ou un certain officier s’empressa de la suivre pensant que personne ne regardait. Mais Théodore était bien loin de cette surveillance attentive, ne contemplant que la fine silhouette de celle qui avait ravi son coeur avec tant d’aisance. S’approchant, il s’éclaircit la voix avant de sourire doucement.

« Mademoiselle, puis-je vous emprunter un instant, et vous conduire à l’écart ? Je crains d’avoir plusieurs points à éclaircir avec vous... »

Il lui proposa son bras en l’admirant. Princesse, elle était princesse et plus rien ne pourraient s’opposer à leur union. De cela il en était persuadé. Il attendit donc avant de la conduire sur le même balcon qu’il avait quitté plus tôt, prenant délicatement ses paumes dans les siennes.

« Mademoiselle, Lisabelle… Vous savez les sentiments que me lient à vous, depuis ce jour où nous nous sommes découverts l’un l’autre… Et... »

Théodore inspira profondément, sortit une boîte de sa poche avant de se mettre à genou devant elle.

« Me voici votre serviteur madame, serviteur de votre désir et de votre personne. Je vous aime, et j’aimerai que vous deveniez mon épouse... »

Elsa et Lisabelle s’étaient donc éloignées toutes les deux, l’anglaise plutôt souriante remise de cette étrange conversation avec Edward quelques instants plus tôt. Elle aurait pu en parler avec Lisabelle, mais préféra attendre le soir où elles pourraient se retrouver l’une et l’autre pour pouvoir parler de ces deux hommes apparus dans leurs vies aussi soudainement que de manière inattendue. Elles passèrent plusieurs minutes l’une et l’autre, Elsa avec un second verre de champagne qui la déridait plus que de coutume, laissant éclater son rire qui attira quelques regards. Puis, elle vit soudain le prince apparaître derrière Lisabelle, eut un grand sourire avant de lâcher :

« Je devrai te laisser, bon courage. »

Elle avait alors reposé son verre, avant de se détourner en ouvrant son éventail, s’enfonçant dans la foule pour les laisser s’entretenir tranquillement. L’anglaise faisait confiance au prince, qui s’était toujours montré respectueux envers Lisabelle, comme s’il s’agissait d’une déesse qu’il ne pouvait conjurer. C’était donc le coeur léger, et les gestes un peu gourds qu’elle traversait la foule à la recherche de nourriture, le ventre creux.

Une main vint pourtant s’emparer de son coude, la faisant se retourner avec surprise. Son coeur s’emballa lorsqu’elle vit l’officier, mais son visage laissa paraître une expression de froideur extrême.

« - Monsieur de Rey. Quelle surprise, je ne vous avait pas vu.
- Moquez vous madame. Vous m’évitez alors que je ne cherche qu’à vous rendre hommage. Mais votre rapprochement avec ce Suédois me déplaît. Un diable de protestant », cracha-t-il, alors qu’il raffermissait sa prise en la repoussant vers une alcove à proximité.

Elsa le gifla alors fermement, piquée au vif par l’insulte adressé à son admirateur, pour une raison qu’elle ignorait. Elle le toisa alors.

« Je suis moi-même anglicane monsieur. Et je ne vous permets pas. Maintenant relâchez-moi. »

Edward avait sourit en regardant Théodore rejoindre Lisabelle. Ils seraient heureux. Il n'en doutait pas, plus. Et comme convenu, il présenterait sous peu ses excuses à la princesse.

Il remarqua Elsa s'éclipser poliment laisser au jeune couple un peu d'intimité. Il remarqua aussitôt l'officier la suivre. Pinçant les lèvres, il se lança donc à leur suite, discrètement, ne voulant pas se montrer indiscret bien que la prise qu'il exerça sur son coude le fit serrer les dents. Il s'avança donc encore, pressant le pas quand il la repoussa dans une alcôve. Il entendit la gifle claquer et aux paroles de l'anglaise comprit bien qui avait prit le coup.

Réprimant difficilement un sourire, il s'avança, se dressant bientôt à l'entrée de l'alcôve, son regard se braqua sur le bougre :

- Sortez immédiatement d'ici Monsieur. Avant que vous ne regrettiez davantage cette entrevue. Votre honneur en pâtirait.

L'homme hésita alors que calmement la main sûre de l'ombre s'était posée sur la poignée de son armi, il était prêt à en découdre. Finalement, Arnaud de Rey se détourna après un regard noir lancé à l'anglaise. Edward la regarda :

- Tout va bien mademoiselle ?

Riant de bon coeur, quoi qu'avec contenue, avec Elsa, Lisabelle n'avait pas vu s'avancer Théodore dans son dos. Aussi, quand Elsa avait lancé un regard par dessus son épaule avant de s'éclipser dans un sourire, elle s'était retournée pour se retrouver devant le prince de Suède. S'inclinant légèrement, elle se laissa guider de bon coeur à l'extérieur.

Que voulait-il éclaircir auprès d'elle ? Cela l'inquiétait un peu alors que l'interrogatoire d'Edward lui revenait à l'esprit, se posait-il lui aussi des questions quand à sa sincérité ?
Mais ce n'était visiblement pas cela parce que bientôt, il s'agenouilla devant elle, lui faisant une inespérée déclaration. Entre ses mains trônait une pierre identique à celles des boucles d'oreilles. Elsa ne s'était pas trompée, en effet, il formulait enfin sa demande.

Le visage de la jeune femme irradia de bonheur soudainement alors qu'elle entourait ses mains des siennespour l'encourager à se relever :

- Rien ne me ferais plus plaisir que d'accepter votre Altesse.. !

Elle souriait, heureuse, n'ayant d'yeux que pour lui, ne sachant pourtant trop quoi faire malgré son irrépressible envie de se glisser dans ses bras.

A la fenêtre, la scène avait été épiée et tous se demandait qui était cette jeune femme à la beauté troublante qui avait su s'attirer les faveurs de ce prince du Nord dont elle serait bientôt l'épouse visiblement. Les murmures se mirent à parcourir l'assistance, arrivant aux oreilles de la famille royale bientôt. Mais pourtant, personne ne savait qui était cette inconnue.

Elle toisait fermement le malotru qui pensait pouvoir ainsi la brutaliser sans vergogne pour avoir adressé la parole à un autre que lui. Le souvenir du coup de Ferdinand la reprit, et elle se replia un peu sur elle-même, une angoisse sourde venant lui saisir le coeur tandis qu’elle pouvait sentir sa prise se faire plus ferme.

Fort heureusement, l’anglaise entendit un pas discret, léger, qui pénétra bientôt dans l’alcove, et la silhouette d’Edward paru quelques instants plus tard. Une forme de soulagement pu se lire sur le visage de la jeune fille qui craignait des renforts venus pour soutenir l’officier. Il prit donc sa défense, et bien qu’elle sentit l’hésitation dans les yeux d’Arnaud, puis une pointe de rage, il se détourna bientôt. Un homme avec peu d’honneur. Mais elle n’aurait pas souhaité voir Edward se battre pour elle.

Elsa avait le souffle plus court, son corset l’empêchant de reprendre un rythme normal. Elle posa un main sur sa taille en opinant rapidement.

« Je crois. Cet idiot m’a surprise, mais je vais bien. »

La brûlure de sa paume se sentait encore sur sa peau

« Merci de votre intervention salutaire, il ne vous apprécie visiblement pas. »

Edward laissa l'homme passé devant lui en le toisant de toute sa taille, tendant bientôt une main à Elsa, rassurée qu'elle aille bien.

- Il peut manquer d'appréciation à mon égard, cela ne lui permet pas plus que son insigne de vous traiter de la sorte. Et je vous avoue que l'inamitié de cet homme me laisse indifférent autant que je la partage.

Il la guidait à nouveau dans la salle, lui trouvant de quoi se remplir le vendre et boire quelque chose de frais alors que bientôt une forme d'exclamation monta dans la salle. Il sourit, c'était fait. Théodore et Lisabelle étaient fiancés. Il regarda Elsa, lui souriant :

- Et si nous allions les féliciter de cette bonne alliance ?

Théodore était encore à genoux, guettant sa réaction, attendant désespérément sa réponse lorsque finalement elle entoura ses mains des siennes pour l’inciter à se relever. Le prince s’exécuta donc, heureux également. Un large sourire perçait le visage qui était resté sérieux durant sa déclaration, et bientôt il glissa la bague au doigt de la jeune fiancé avant d’y déposer un doux baiser. Ses yeux la dévorait, et son coeur la désirait avec ardeur.

« Vous faites de moi un homme heureux madame… »

En sentant tous les regards posés sur eux avec plus ou moins de discrétion, Théodore n’osa pourtant pas la confronter quant à son titre, se contentant donc de l’attirer dans ses bras pour l’y serrer avec douceur, un éternel sourire pendu à ses lèvres.
Il savait qu’ils feraient parler pendant quelques jours, le temps de quitter la France pour rejoindre la Suède où ils pourraient présenter sa fiancé à ses parents. Puis ensuite, quelques mois d’attentes avant le véritable mariage. Une torture. Mais il l’endurerait car elle se trouverait à ses côtés, et pour elle il le pouvait.

Se penchant au creux de son oreille, il se décida à souffler.

« Je t’aime Lisabelle. »